Entraînement en plein air avec COVID-19

Jérémie Chase, physiologiste et entraîneur de conditionnement physique

Avec l’arrivée des beaux jours, de nombreux athlètes cherchent à s’entraîner en plein air. C’est particulièrement vrai pour les athlètes pratiquant des sports d’endurance, qui s’entraînent et participent à des compétitions à l’extérieur et passent les mois d’hiver à s’entraîner dans des installations sportives.

Avec la pandémie de COVID-19, les athlètes et le grand public s’intéressent de plus en plus à la façon dont les germes et les virus se propagent. Récemment, des articles ont circulé sur les médias sociaux pour discuter de la façon dont les directives actuelles de « distanciation sociale » pourraient ne pas être adéquates lors d’une activité physique.

À l’heure actuelle, la plupart des gouvernements nord-américains recommandent aux individus de rester à une distance minimale de 2 mètres (6 pieds) les uns des autres afin de réduire le risque de propagation du virus. Ces distances ont été établies à partir d’une étude des années 1930 montrant comment les gouttelettes se propagent autour d’un adulte debout.1 Ces directives ont été remises en question récemment, certaines preuves montrant que les virus plus petits (comme le SRAS et le COVID-19) peuvent être piégés dans des particules d’aérosol, qui sont des gouttelettes d’eau encore plus petites et qui peuvent rester en suspension dans l’air pendant de plus longues périodes.2

Même en supposant que les lignes directrices sont toujours acceptables, nous devons noter certaines différences distinctes lorsque nous comparons la position debout statique et l’activité physique :

  • Niveau d’effort — La position debout n’exige pas beaucoup du corps. Lorsqu’ils sont actifs, surtout à des intensités élevées, les individus actifs inspirent beaucoup plus d’air et expirent beaucoup plus fort, envoyant leur souffle beaucoup plus loin qu’en position assise.
  • Mouvement — En période d’inactivité, les gouttelettes provenant de la bouche sont exhalées devant le corps. En l’absence de vent, elles tomberont probablement dans la zone située devant la personne qui respire. En période d’activité et de mouvement, l’air expiré plane dans l’air, mais le mouvement vers l’avant de l’individu actif signifie que les particules en suspension sont derrière lui près du point d’expiration jusqu’à ce qu’elles atteignent le sol. Toute personne suivant de près l’individu actif peut, sans le savoir, recevoir des particules aérosol en plein visage à cause de son souffle.

Une étude aérodynamique récente a examiné la façon dont les particules d’aérosol se déplacent autour des individus actifs en utilisant des simulations en soufflerie3. Essentiellement, une « queue de comète » se forme derrière un individu actif, qui est d’autant plus longue qu’il se déplace rapidement. On peut probablement supposer que cette traînée est plus dense à mesure que l’individu fait de l’exercice. Les auteurs ont noté que le fait d’être derrière et en diagonale par rapport à l’individu réduisait l’exposition aux gouttelettes.

Enfin, les auteurs de l’étude recommandent les distanciations suivantes entre les individus :


 

Activité Distance Exemple visuel approximatif de la distance
Marche rapide (4 km/h) 4-5 mètres Voiture berline typique (4,5 m)
Course, vélo lent (14,4 km/h) 10 mètres Un bus scolaire typique en pleine longueur (13 m)
Vélo rapide (30 km/h) 20 mètres Une semi-remorque pleine grandeur (21-24 m)

Note — ils n’ont pas tenu compte d’un vent de travers dans cette étude.


L’objectif de cet article n’est pas de décourager les activités en plein air. Il s’agit de s’assurer que cela se fait en toute sécurité pour la santé de tous.

[bs_lead]Les points à retenir pour ceux qui sont impatients de s’entrainer à l’extérieur :[/bs_lead]
  • Faites attention lorsque vous dépassez les autres en marchant, en courant ou en faisant du vélo. Plus vous allez vite, plus vous devez prendre votre temps avant de revenir dans la même « voie » qu’un autre individu.
  • Si vous vous faites dépasser par un marcheur, un coureur ou un cycliste plus rapide, gardez un œil sur l’endroit où il s’insère devant vous. Si vous pensez qu’il est trop près, essayez de contourner sa « queue de comète » ou faites une pause pour lui donner le temps de trouver son sythme.
  • Gardez à l’esprit la direction du vent et faites une estimation prudente de l’impact qu’il pourrait avoir sur les particules d’aérosol provenant de ceux qui sont près de vous.
  • Si l’endroit où vous faites de l’exercice ne vous permet pas de suivre les recommandations ci-dessus, il est probablement trop fréquenté et il faut envisager un autre endroit.
  • Ceux qui font de l’exercice en groupe doivent laisser plus d’espace, même si les directives relatives à la distance sociale sont assouplies. Les cyclistes et les coureurs expérimentés qui s’entraînent en se relayant les uns les autres devraient éviter de le faire pendant la pandémie de COVID-19. Il convient également d’en tenir compte dans un avenir post-COVID où l’état de santé des cyclistes et des coureurs de tête devrait être pris en considération afin de réduire le risque de propagation d’une maladie à l’ensemble du groupe/de l’équipe.

Restez en sécurité et en bonne santé !


References

  1. Wells, W.F. On air-borne infection: Study II. Droplets and droplet nuclei., American Journal of Epidemiology, Volume 20, Issue 3, November 1934, Pages 611–618, https://doi.org/10.1093/oxfordjournals.aje.a118097
  2. Bourouiba L. Turbulent Gas Clouds and Respiratory Pathogen Emissions: Potential Implications for Reducing Transmission of COVID-19. Published online March 26, 2020. doi:10.1001/jama.2020.4756
  3. Blocken, B., Malizia, F., van Druenen, T., Marchal. T. Towards aerodynamically equivalent COVID19 1.5 m social distancing for walking and running. Article not yet peer-reviewed.